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Enchères immobilières et Amepi

Enchères immobilières sur internet

Certaines agences ont mis en place des « enchères immobilières » pour prendre, conserver ou renégocier des mandats exclusifs. Ce système consiste à prévenir tous les clients intéressés qu’une enchère se tiendra sur internet, dans une « salle des ventes virtuelle», à une date fixée à l’avance. Plusieurs opérateurs proposent déjà une telle solution.

La transmission des offres d’achat

Il semble que certaines agences ne transmettent pas les éventuelles offres d’achat au propriétaire, dès le début du processus, pour ne pas y mettre un terme prématurément.
Cela peut poser un problème dans un fichier Amepi local, dont le règlement prévoit généralement que les offres apportées par une autre agence doivent être transmises immédiatement et qu’une réponse doit être donnée sous 48 heures. (La signification d’AMEPI est : association des mandats exclusifs des professionnels immobiliers).

Les enchères immobilières côté juridique

Ces enchères se développent rapidement, et donnent généralement entière satisfaction aux agences qui y ont recours. Notre propos n’est donc pas de nous contenter de constater a priori une incompatibilité avec la pratique des mandats exclusifs partagés, mais au contraire d’analyser dans quelles conditions juridiques et pratiques elles peuvent trouver leur place au sein des associations locales qui y sont confrontées.
Elles ne se font que par le biais de mandats exclusifs, le fichier AMEPI est donc concerné.

Les offres d’achat doivent être transmises dans les meilleurs délais

L’article 8 du Code de déontologie de l’immobilier précise s’il en était besoin que les agents immobiliers s’obligent à « transmettre à leur mandant dans les meilleurs délais toute proposition répondant au mandat confié ; »
(Décret n° 2015-1090 du 28 août 2015 fixant les règles constituant le Code de déontologie applicable à certaines personnes exerçant les activités de transaction et de gestion des immeubles et des fonds de commerce).
Le non-respect de ce Code peut être sanctionné pénalement, il s’agit donc nécessairement d’un texte d’ordre public.
Le Code civil nous tient à peu près le même langage : article 1993 : « Tout mandataire est tenu de rendre compte de sa gestion, et de faire raison au mandant de tout ce qu’il a reçu en vertu de sa procuration, quand même ce qu’il aurait reçu n’eût point été dû au mandant. »
Il n’est donc pas possible de surseoir à la transmission d’une offre. Même si une offre a déjà été transmise, fût-elle au prix. Nos mandats étant des mandats d’entremise même s’ils sont improprement qualifiés de mandats de vente, le vendeur peut en effet toujours légitimement refuser de donner suite à une offre au prix. Dans ce cas selon les circonstances il devra des dommages-intérêts à l’agence, mais on ne peut pas le contraindre à accepter l’offre. Et s’il reçoit simultanément une offre moins élevée, rien ne lui interdit de préférer celle-ci, éventuellement de la renégocier.
La non transmission immédiate d’une offre pourrait entraîner une action judiciaire, de la part du vendeur comme du proposant, pour perte de chance de vendre ou d’acheter ; ainsi que de la part d’une agence adhérente au fichier AMEPI pour concurrence déloyale (la déloyauté du comportement résulte en effet du simple non-respect de la réglementation, Cass. Com. Avril 1997, Bull. Civ. IV n° 87, et l’existence d’un préjudice s’infère nécessairement des actes déloyaux, Cass. Com. 27 mai 2008n° 07-14422, entre autres).

Le mandant peut prendre son temps pour accepter l’offre

En ce qui concerne l’obligation faite au mandant de répondre sous 48 heures, si elle est seulement dans le règlement de l’association locale, elle n’est pas opposable au mandant. Intégrée au mandat, elle créerait une obligation contraignante non prévue par les textes et donc, sous réserve de l’interprétation des tribunaux, un déséquilibre significatif entre les parties. La réforme du droit des obligations, applicable depuis le premier octobre dernier, stipule (art. 1171 du Code civil) que dans un contrat d’adhésion, toute clause qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties est réputée non écrite. Maintenir cette clause serait possible mais nécessiterait une solide justification.
Et le mandant peut avoir des raisons parfaitement légitimes pour ne pas répondre dans un bref délai.

L’articulation avec les enchères immobilières

Le partage de mandats exclusifs fonctionne sur la base d’une délégation de mandats. Le mandat est en principe délégué entièrement, en ce comprises les modalités d’enchères, qui devront donc être respectées par tous les intervenants. L’agence délégataire devra donc demander à ses clients intéressés de participer aux enchères, mais devra également transmettre par la voie habituelle les offres qu’elle recueillerait par ailleurs.
Quelles que soient les circonstances, toutes les offres doivent être transmises au mandant au fil de l’eau, même si l’agence l’a engagé dans un processus d’enchères. Mais compte tenu de la mise en place nécessairement longue de cette vente, il est légitimement possible d’interdire contractuellement au vendeur d’accepter toute offre prématurée jusqu’au soir des enchères ; à charge pour l’agence, et les agences de l’association locale, de prévenir les candidats à l’achat de ce délai.
Les enchères pourront donc se dérouler normalement.
Si le mandant acceptait une offre prématurément, au mépris de ses engagements, et que cela cause un préjudice à l’une ou l’autre des agences, il en devrait naturellement réparation. Mais son intérêt sera d’attendre les enchères, sachant que même en présence d’une offre au prix, il pourra alors peut-être en obtenir plus.
Quant aux opérateurs proposant cette solution, il suffit de les prévenir de ces contraintes.

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À propos de l'auteur 

Jean Claude MIRIBEL:
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