Offre d’achat acceptée, le vendeur refuse de poursuivre : quelle condamnation ?

Une offre d’achat acceptée est un contrat qui lie les parties : par principe le vendeur ne peut se rétracter.

Depuis la loi SRU, qui interdit tout versement dans le cadre d’une offre unilatérale, nombreux sont ceux qui s’imaginent, même parmi les professionnels de l’immobilier, qu’une offre d’achat, fût-elle acceptée, n’a aucune valeur.

La situation est en général la suivante : un agent immobilier trouve un acquéreur, rédige une offre d’achat et la fait accepter par le vendeur, dans l’attente de la rédaction du compromis. Il y a donc accord sur la chose et sur le prix, ce qui rend la vente parfaite.

Un deuxième agent immobilier trouve alors un autre acquéreur à des conditions plus avantageuses pour le vendeur, et convainc celui-ci que la première offre d’achat ne l’engage pas. Il lui en fait accepter une deuxième, voire lui fait signer directement un compromis.

Le vendeur a donc accepté deux offres, vendu deux fois… et se trouve dans une situation très inconfortable. Le premier acquéreur pourra intenter une action en vue d’obtenir la vente judiciaire, ou des dommages-intérêts. Le deuxième également… Et l’agence évincée voudra être indemnisée.

Il pourra se retourner éventuellement contre l’agence qui l’a mal conseillé, mais il lui faudra au moins prouver qu’elle était au courant de la première offre.

Dans l’arrêt présenté, le mandant avait accepté l’offre, puis avait refusé de donner suite « pour raisons personnelles ». Il a été condamné à verser à l’agence 20 000 € de dommages et intérêts.

Elle (le mandant, ndlr) est donc seule responsable de l’échec du mandat de vente qu’elle avait donné le 14 janvier 2005 à la S.A.R.L. Cabinet d’Affaires Eric DIAZ ce qui l’oblige, en raison de son refus de signer un compromis aux prix, charges et conditions convenues définitivement avec les acquéreurs, à verser à cette société une indemnité compensatrice forfaitaire égale au montant de la commission prévue, ce par la simple application des stipulations du mandat ci-dessus.

Achat d'un bien immobilier : condamnations de non-poursuite

Les offres d’achat vues par la Cour de cassation :

Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du mardi 8 juin 2010
N° de pourvoi: 09-66495

Le vendeur avait accepté l’offre par fax, puis était revenu sur cet accord en prétendant s’être trompé sur le prix. La cour d’appel avait jugé la vente parfaite, la Cour de cassation confirme.

Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du jeudi 29 septembre 2016
N° de pourvoi: 14-26674 

La vente a été considérée parfaite suite à une offre acceptée et un refus du vendeur de poursuivre : “Mais attendu qu’ayant constaté que, par l’acte intitulé ” lettre d’intention d’achat “, M. Y… avait offert d’acquérir la propriété de l’appartement pour la somme de 1 800 000 euros, relevé que l’établissement d’un ” compromis ” notarié prévu par cet acte n’était pas une condition de formation de la vente et que l’offre de vente et son acceptation n’étaient soumises à aucune forme particulière et retenu que Christiane X…, en signant et apposant la mention ” bon pour accord ” sur la lettre de son avocat faisant état de cette proposition d’achat, et M. X…, par l’intermédiaire de son avocat, avaient donné leur accord à cette offre, la cour d’appel, qui n’était pas tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, en a exactement déduit que la vente était parfaite par l’accord des parties sur la chose et sur le prix ;”

Attention toutefois une offre d’achat contenant une formule du genre “« En cas d’acceptation de la présente proposition, un acte sous seing privé sera établi pour préciser toutes les modalités de la vente”, ne peut pas être considérée comme engageant les parties puisque les modalités de la vente ne sont explicitement pas encore précisées. (Cour de cassation, chambre civile 1, audience publique du mercredi 26 septembre 2018, n° de pourvoi: 17-11023). En outre une telle formulation ne permet pas à l’agence de percevoir sa rémunération puisque la vente n’est pas “effectivement conclue” :

Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du jeudi 16 novembre 2017
N° de pourvoi: 15-12268 

Mais attendu qu’ayant relevé que le conditionnel employé par le gérant de la société de la Briquetterie dans sa réponse à l’offre d’achat de la société Jonalex démontrait que son accord était réservé et souverainement retenu que certains aspects du contrat considérés comme essentiels par l’acquéreur n’avaient pas fait l’objet d’un accord du vendeur, la cour d’appel a pu, par ces seuls motifs, en déduire que les échanges entre les parties n’avaient jamais dépassé le stade des pourparlers et que la vente ne pouvait être considérée comme parfaite ;

Dans le même sens :

Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du jeudi 8 novembre 2018
N° de pourvoi: 17-22660

Mais attendu qu’ayant relevé, par motifs propres et adoptés, que M. X… avait donné mandat général à l’office notarial de trouver un acquéreur et de finaliser la vente, que le notaire, en informant la société Provalim du prix demandé par le vendeur, avait précisé qu’il soumettrait la réponse écrite à son client, M. X…, qu’à réception de l’accord de la société Provalim il avait indiqué à celle-ci que M. X… se réservait le droit d’examiner les conditions de cette offre et qu’à la demande du notaire de l’acquéreur il avait établi, sans accord définitif du vendeur, un projet de promesse de vente non signé, la cour d’appel, qui a retenu à bon droit que la société Provalim n’avait reçu du notaire qu’un mail d’information et non une offre de vente

Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du jeudi 27 juin 2019
N° de pourvoi: 18-15863

Mais attendu, qu’ayant souverainement retenu, sans dénaturation, que l’analyse des pièces produites démontraient que les parties avaient, d’un commun accord, soumis la rencontre de leur volonté respective de vendre et d’acquérir à la conclusion d’un avant-contrat et qu’elles en étaient restées au stade des pourparlers lorsque M. M… et la société NP investissement avaient introduit l’instance, la cour d’appel, qui n’était pas tenue de répondre à des conclusions que ses constatations rendaient inopérantes, a pu en déduire, abstraction faite de motifs surabondants, que la vente n’était pas parfaite ;

Une offre acceptée précisant la nécessité d’un acte sous seing privé pour fixer les modalités de la vente ne vaut pas accord sur la chose et sur le prix : ” La cour d’appel a relevé que la lettre d’intention d’achat stipulait qu’en cas d’acceptation de l’offre, un acte sous seing privé serait établi pour préciser toutes les modalités de la vente et l’ensemble des conditions suspensives particulières. Elle a retenu, par une interprétation souveraine, exclusive de dénaturation, du document du 9 décembre 2014, que son ambiguïté rendait nécessaire, que l’existence de la vente était subordonnée à la rédaction d’un acte sous seing privé. Elle en a exactement déduit que l’acceptation, par Mmes [R] et [W], d’une offre d’achat pour le prix de 424 000 euros, qui était imprécise, ne constituait pas un contrat de vente parfait, mais relevait de pourparlers contractuels.” Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 11 mai 2023, 22-11.287, Inédit

Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du jeudi 29 juin 2017
N° de pourvoi: 16-18288 

Portée du comportement de l’acquéreur postérieur à l’expiration de la promesse :

Mais attendu qu’ayant relevé, par des motifs non critiqués, que la société Akerys promotion avait fait borner, le 16 mai 2008, le terrain par un géomètre expert et, le 15 septembre 2008, obtenu un jugement du tribunal administratif validant le permis de construire et retenu qu’elle avait ainsi, par des actes clairs et non équivoques, manifesté, après la date fixée pour la réitération de la vente, sa volonté de poursuivre la réalisation de la vente, la cour d’appel en a exactement déduit, abstraction faite d’un motif surabondant, que la vente était parfaite et que les demandes de la SCCV devaient être accueillies ;

En cas de refus fautif d’une des parties de ratifier la vente définitive, la rémunération de l’agence est due :

Cour de cassation
chambre civile 1
Audience publique du mercredi 10 octobre 2018
N° de pourvoi: 16-21044 :

L’acte engageant les parties et ouvrant le droit à honoraires de l’agent immobilier n’est pas forcément un acte authentique : “Qu’en statuant ainsi, alors qu’elle avait retenu que la signature de la promesse synallagmatique de vente constituait un accord définitif sur la chose et sur le prix, et que M. et Mme X… ne pouvaient, sans commettre une faute, refuser de la réitérer, faisant ainsi ressortir que l’opération avait été effectivement conclue, de sorte que ce refus ne pouvait avoir pour effet de priver l’intermédiaire de son droit à rémunération ou à indemnisation, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;”

Voir l’article : une offre d’achat doit être transmise sans délai au propriétaire.

Par principe une offre d’achat acceptée engage le propriétaire : il risque au mieux de devoir payer des dommages-intérêts, au pire la vente judiciaire.

Des vendeurs ont accepté une offre sans condition suspensive de demande de prêt, puis se sont rétractés au bénéfice d’un acquéreur plus offrant, ils sont condamnés : “En statuant ainsi, alors qu’il résultait de ses constatations que la proposition d’achat du 16 mai 2016, qui indiquait la chose à vendre et le prix proposé sans concours bancaire avait été contresignée par M. et Mme [B] qui y avaient ajouté la mention manuscrite « lu et approuvé, bon pour acceptation de l’offre », de sorte qu’il y avait accord des parties sur la chose et sur le prix rendant la vente parfaite, la cour d’appel a violé le texte susvisé.” Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 16 mars 2022, 21-10.586, Inédit

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202 Commentaires

  1. Bonsoir Mr MIRIBEL, comme pas mal de vos lecteurs j’ai l’impression de me faire avoir.
    Je viens, après négociation, de faire une offre écrite sur un appartement T4 au prix demandé par le vendeur. Ce vendeur notifie par mail à sa notaire qu’il acceptait mon offre. Sa notaire répond par mail à ma notaire “qu’enfin Mr X acceptait mon offre”.
    Nous entamons les procédures et bingo, 2 jours après le vendeur ne souhaite plus vendre car il a reçu une offre de 5000€ supérieure à la mienne !
    En parcourant vôtre blog et sur les conseils de mon notaire, je comprends bien que la vente me reviens et que je peux attaquer le vendeur. Mais voilà…l’acceptation par mail fait-elle office de preuve ?
    Si je devais l’attaquer vers quel type (spécialité) d’avocat dois-je me retourner ?
    Et ai-je réellement une chance de récupérer cet appartement, et surtout au bout de combien de temps ?
    Merci.

    • Bonjour M. MONDON,
      Faites valoir par votre notaire que vous voulez acheter, puis convoquez le vendeur par huissier pour la signature du compromis. Le mieux serait de vous faire assister par un avocat spécialisé en immobilier.
      Dire que vous aurez gain de cause au tribunal au final si vous ne faites pas plier le vendeur,n’est pas évident, le consentement en immobilier est plus compliqué que pour l’achat d’une voiture par exemple,

  2. Merci beaucoup Mr Miribel.
    La convocation par huissier me paraît juste.
    Je vais suivre vos conseils.
    Encore merci pour votre assistance!

  3. Merci pour cet article très intéressant! J’ai pour ma part une Offre d’Achat accepté par le vendeur mais les résultats des diagnostics ont montré des travaux à faire. Lors de ma visite du bien avant de faire une offre, j’avais spécifiquement demandé s’il y avait des toitures en amiante et l’état de le fosse sceptique. Les vendeurs, en présence de leur agent immobilier avaient répondu par la négative. Hélas, il y a une toiture en amiante et la fosse a besoin de quelques travaux. Les vendeurs refusent tout travaux et hier j’ai reçu par email un ultimatum de leur agent: J’ai jusqu’à demain pour poursuivre la vente ou le bien sera remis sur le marché. Quel est l’engagement du vendeur avec cette Offre d’Achat? Suis-je en droit de demander que des devis soient établis pour ces travaux afin de décider?

  4. Bonjour Cali,
    Les diagnostics amiante et assainissement entre autres devraient être joints à toute promesse de vente, donc à toute offre acceptée.
    https://www.legifrance.gouv.fr/affichCode.do;jsessionid=6A8F99EBF5957691B4FC8499361665CC.tplgfr32s_2?idSectionTA=LEGISCTA000006176358&cidTexte=LEGITEXT000006074096&dateTexte=20180510
    Personne ne le fait, les surprises arrivent après.
    Alors soit votre offre de vente vaut vente, et vous voulez vraiment acheter mais en faisant réaliser des travaux par le propriétaire, mettez le en demeure de poursuivre la vente avec vous mais sans l’amiante et avec un assainissement aux normes. Ce impérativement avec l’assistance d’un avocat spécialisé. Le terrain est glissant et le résultat pas garanti, je n’ai pas eu connaissance de jurisprudence sur ce point précis.
    Deuxième option vous accrocher à la validité de l’offre, bien faire comprendre au vendeur qu’il est lié, et accepter de signer un compromis, mais exiger une négociation du prix ou une prise en charge de tout ou partie des travaux par le vendeur.
    Si l’offre ne vaut pas vente mais seulement entrée en pourparlers ou si sa validité est conditionnée à la signature d’un compromis par exemple vous devrez négocier mais sans aucun moyen de pression.
    La première chose à faire est évaluer la portée juridique de votre offre.
    Si les vendeurs ne veulent pas faire de devis, vous ne pouvez pas les y obliger.

  5. Monsieur MIRIBEL, mille merci d’avoir pris le temps de me répondre et un plus pendant un jour férié! Lorsqu’on fait une offre d’achat, souvent les diagnostics ne sont pas encore faits, ce qui était mon cas. Plus j’y pense, plus je crois que je ne vais pas donner suite. Si vous pouvez par contre me recommander un notaire COMPÉTENT dans le 16, 17 ou le 33, je suis prenante pour mon prochain achat. Merci encore pour votre réactivité.

    • Bonjour,
      Je ne travaille pas directement avec des notaires de ces départements. Je peux donc difficilement vous conseiller sur ce point. Sachez cependant que de nombreuses nouvelles études viennent d’etre créées, tenues généralement par de jeunes notaires compétents et dynamiques.

  6. Bonjour Monsieur,
    Nous avons visité une maison le 5mai 2017 puis après négociation avec l’agence, nous obtenons l’accord du propriétaire vis l’agence par téléphone. Le 10 mai, nous confirmons notre achat à l’agence par mail au prix accepté par le propriétaire.
    Il s’avère que vendredi soir 11 Mai, la responsable de l’agence nous appelle pour nous dire qu’il y avait une autre personne intéressée avec une offre plus intéressante que la nôtre et nous sous-entend qu’elle accepterait cette offre si plus élevée que la nôtre.
    Nous sommes vraiment dégoûtés car nous avons fait beaucoup de projets, 2 visites et une demande auprès de notre banque. L’agence dans ce cas peut elle nous annuler la vente? Que faire pour faire valider définitivement la vente avec notre engagement par mail? l’agence a t elle le droit de tout nous annuler? Merci pour votre réponse
    Bien cordialement

    • Bonjour,
      Ce qu’il faudrait établir c’est l’accord du propriétaire sur votre offre. Si vous n’avez rien de formel essayez de l’obtenir par mail, en rappelant que cet accord vous avait bien été transmis et que donc la vente était parfaite.

  7. Bonjour Monsieur Miribel,
    Nous sommes en cours de négociation via une agence depuis le 05/05 pour un bien mis sur le marché depuis le 04/05 (nous sommes les acquéreurs).
    Vendredi 11/05 nous tombons enfin d’accord sur le prix (verbalement, car il me semble que l’agence n’a pas pu faire signer l’offre aux vendeurs) et convenons d’une signature samedi prochain 19/05.
    Les vendeurs ont demandés les documents ALUR en vue de ce compromis et l’agence à stopper les visites.
    Et hier j’aperçoit le bien mis en vente le matin même par les vendeurs sur un site entre particuliers. J’ai aviser l’agent immobilier qui lui-même ne comprends pas et n’arrive plus a les joindre.
    Quels sont mes recours ?
    Ils ont signé une exclusivité mais sont encore dans les 14jours de rétractation.

    Merci pour votre Aide.

  8. bonjour jai accepter une offre achat poir maison sans condittions je suis pas.encore passer devant le.notaire mais.je regrette par ce que je refise de vendrz que ce que je dois faire merci

  9. Bonjour,nous avons visité une maison le 5 mai, une semaine après, nous avais fait une offre orale que le vendeur à accepté. Nous avons appris ce soir là qu’il avait déjà accepté et signé une lettre d’intention d’achat 15 jours plus tôt. Il nous a dit vouloir traité avec nous en direct et non plus par agence. Après avoir prevenu son notaire pour la signature du compromis,il prévient son agent immobilier qu’il a reçu une meilleure offre et qu’il ne souhaite plus vendre au 1er acquéreur qui avait fait une offre inférieur de 10 000e par rapport à nous. L’agent immobilier le menace de poursuite judiciaire. Hors une erreur apparait dans la lettre d’intention d’achat, celle ci est daté du 31 mars mais leur visite n’a eu lieu que fin avril. Cette erreur de date rend t-elle la lettre d’intention d’achat invalide ? Est il libre de nous vendre la maison en direct sans risque de poursuite ? Merci d’avance de votre réponse.

    • Bonjour,
      Une erreur de date ne rend pas l’acte automatiquement nul. D’autant que ça ne changerait pas grand chose probbablement que l’offre soit réellement plus vieille d’un mois.
      Il faut voir quelle est la rédaction de l’offre acceptée. Si elle peut être considérée comme une vente ferme, l’offrant pourrait obtenir la vente judiciaire. Si elle n’est qu’une entrée en pourparlers, le vendeur pourrait être condamné à des dommages-intérêts pour rupture abusive des négociations. A moins que l’offre ne stipule clairement qu’elle est soumise à la signature d’un compromis avant le… sous peine de nullité.

      • Merci pour votre réponse. Nous ne savons pas si la lettre d’intention d’achat contient une date déchéance ou pas. Nous allons nous renseigner. Merci.

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